Edito paru dans le supplément "Focus Famille" de 24 heures et la Tribune de Genève du 12 mars 2022
Les premières difficultés surviennent dès l’apparition des symptômes, dans la recherche d’un diagnostic. Les parents doivent consulter de nombreux spécialistes et, selon les maladies, l’errance médicale peut aller jusqu’à neuf ans. Parfois, il est impossible de poser un diagnostic clair, ce qui complique grandement la prise en charge financière par les assurances. Actuellement en Suisse de nouvelles structures sont en train de se mettre en place dans les grands centres médicaux universitaires, mais la prise en charge pluridisciplinaire n’est pas encore opérationnelle dans toutes les régions.
Lorsque le diagnostic est établi,
il s’agit en premier lieu pour les parents d’encaisser le choc, de faire le
deuil de l’enfant rêvé, de leur vie personnelle et des priorités de la famille.
Tout le projet de vie familial est remis en question et il faut parfois de
longs mois aux parents pour se faire à l’idée que plus rien ne sera comme
avant. Les parents se retrouvent seuls face à eux-mêmes pour débuter ce
parcours du combattant.
Le recours à des associations et
à des groupes de parole est bénéfique, mais cela prend parfois du temps et un
changement de mentalité pour oser demander de l’aide. Il n’est pas non plus
facile pour les parents de se retrouver dans un contexte associatif, entourés
d’autres enfants ou jeunes atteints par la même pathologie, et de se projeter dans
la réalité de la vie future de leur enfant.
Le quotidien s’organise petit à
petit autour de l’enfant. Chaque geste courant demande bien souvent de
l’assistance, même si chaque maladie et chaque enfant est différent :
lever, coucher, habillage, hygiène, repas, aller aux toilettes, maquillage,
surveillance pour éviter les chutes, l’étouffement, la déshydratation… Chaque acte
s’apprend sur le tas, en fonction de l’évolution de la maladie et des capacités
physiques et cognitives de son enfant sur le moment.
Pour faire face à cette nébuleuse
de questions à gérer, qu’elles soient médicales, sociales, financières ou
scolaires, un des parents (souvent la mère) se voit contraint de renoncer à son
activité professionnelle pour prendre en charge son enfant malade. Le parent aidant
devient le grand coordinateur de vie
autour de la maladie, c’est un travail à plein temps. Cette situation à
d’importantes conséquences sur les revenus du ménage et sur la prévoyance pour
la retraite, notamment pour les femmes.
Dans ce contexte, il devient très difficile de prendre du recul et d’avoir
du temps pour soi, qui serait pourtant nécessaire pour reprendre des forces. Il
est compliqué de lâcher prise et de laisser une autre personne s’occuper de son
enfant. L’aidant et l’enfant développe un lien affectif exacerbé et une
dépendance entre eux, et pour l’enfant il est compliqué de faire confiance à d’autres
personnes.
En Suisse, le statut de proche
aidant est peu reconnu et encore moins financé. Les indemnités versées au titre
de l’allocation pour impotent ne couvre pas le revenu perdu par le parent qui a
renoncé à son activité professionnelle. L’argent reste le nerf de la guerre.
Avec un enfant malade et à mobilité réduite, tout peut coûter plus cher :
les vêtements, les chaussures, les véhicules, les vacances également, un
hébergement plus coûteux s’impose souvent pour des questions d’accessibilité.
Un revenu stable et garanti
permettrait au parent aidant de s’accorder plus régulièrement des activités et du
temps libre et apporter à toute la famille un peu plus de sérénité pour
l’avenir.